A vous qui n’êtes pas moi, qui n’êtes peut-être même pas timide ou réservé. A vous qui m’avez souvent fait remarquer que je ne parlais pas assez, que j’avais l’air craintive ou trop couvée. A vous qui pensez que je n’avais probablement pas de caractère ou des choses à dire, à vous qui ne voyaient en moi que la fille effacée au fond de la classe. J’aimerai vous dire que rien n’a jamais été facile, depuis toujours. Vos regards, vos «Dis-donc elle est toujours aussi timide votre fille» comme si je n’existais pas alors que je n’étais qu’à quelques centimètres de vous. Votre surprise lorsque je souhaitais me faire entendre comme si je n’étais pas une personne qui pouvais avoir ses propres pensées, ses propres idées. Tout ça n’était pas simple à vivre, rien ne me facilitait la tâche puisqu’il est plus simple de laisser de côté ceux qui n’arrivent pas à s’exprimer en grand comité plutôt que ceux qui brillent quand les autres les regardent. Mais au fond, rien de tout ça n’était votre faute, vous jugiez seulement ce que vous voyez, et sans doute ce que vous ne compreniez pas sans chercher à le comprendre. Vous préfériez plutôt allez vers ceux qui parlent, vers ceux qui semblent avoir confiance en eux. Après tout, c’est plus rassurant. Les timides bizarres préfèrent rester entre eux, non ? Après tout c'est de leur faute, leur timidité ne dépend que d'eux n'est-ce pas ? Mais sachez que se demander dix fois si l’on devrait prendre la parole vaudrait le coup alors qu’il est déjà trop tard n’a rien d’une partie de plaisir. Puisque oui, se forcer à prendre la parole demande un effort surhumain et du courage même. Pour vous bien sûr c’est anodin, c’est facile et ceux qui ne le font pas n’ont sans doute rien à dire, rien à penser encore une fois. Mais détrompez-vous, on ne dit peut-être rien mais on entasse des idées qu’on commence à créer, parfois à s’approprier et à développer. On ne dit rien mais on en pense pas moins. Non, nous ne sommes pas idiots ou incapable de penser, nous n'osons pas. Là est toute la nuance.